Nom : Brittney King Brock
Entreprise : King Creative Group
Industrie : Musique/ Divertissement

 

Tanya : Bonjour et bienvenue! Alors, vous avez fondé et vous dirigez King Creative Group. Parlez-nous de votre entreprise.

Brittney : King Creative Group est une société de divertissement et de médias polyvalente qui se spécialise dans la gestion des talents, les relations publiques et le développement et la production de contenu.

Tanya : Formidable. Comment êtes-vous devenue entrepreneure?

Brittney : C’est une question très intéressante, car j’ai l’impression d’avoir été amenée à devenir entrepreneure par défaut. C’est quelque chose qui a toujours été en moi. J’ai toujours voulu prendre les décisions. Lorsque j’étais dans d’autres contextes, en particulier dans des environnements d’entreprise, je me sentais toujours comme un poisson hors de l’eau, comme si je n’avais pas ma place.
J’aime vraiment la souplesse et la créativité. L’industrie du divertissement est très fluide. Ce n’est pas aussi rigide que dans un contexte d’entreprise typique. Il y a des similarités, comme les histoires de bureau, mais il n’y a pas d’horaire standard de neuf à cinq.

J’ai eu beaucoup d’emplois avant de devenir l’entrepreneure que je suis aujourd’hui. Je voyais certaines choses dans ces systèmes avec lesquelles je n’étais pas d’accord. J’imaginais constamment à quoi pourrait ressembler mon parcours. Et il m’a fallu beaucoup de temps pour en arriver là où je suis aujourd’hui, en ayant entièrement confiance de pouvoir le faire par moi-même.

Tanya : Génial. J’adore votre réponse. Donc quel est, selon vous, le geste le plus audacieux que vous ayez posé en affaires jusqu’à présent?

Brittney : L’an dernier, je travaillais comme présidente des opérations et directrice générale pour une maison de disques indépendante. C’était un excellent travail en théorie. Cependant, je savais que j’entamais une étape différente de ma vie. Je suis devenue mère, et j’avais beaucoup de responsabilités et d’engagements que je ne voulais pas sacrifier. J’ai donc décidé de faire le grand saut et de consacrer toute mon énergie à la création de ma propre entreprise, King Creative Group.

Au cours de la dernière année, j’ai vraiment mis toute mon attention et mon énergie dans King Creative Group. Que ce soit pour bâtir mon équipe ou mes partenaires, j’étais déterminée à miser sur moi-même.

C’est incroyable. J’ai maintenant confiance en mes capacités, car je ne sens plus que j’ai besoin de plaire à tout le monde. J’ai pris la décision ferme que c’était ça, et c’est effrayant. C’est particulièrement audacieux d’être une femme, une femme de couleur, parce que je travaille dans un secteur à prédominance masculine. Le changement dans lequel je me trouve en ce moment a certainement été ma décision la plus audacieuse à ce jour.

Tanya : Vous travaillez dans un secteur où il y a très peu de femmes et encore moins de femmes noires. Pouvez-vous nous parler de votre expérience en tant que femme dans ce secteur? Cela vous a-t-il aidée dans votre parcours d’entrepreneuriat?

Brittney : Être une femme est devenu mon superpouvoir, car je me retrouve souvent dans des pièces où il n’y a que des hommes. Surtout dans le secteur de la musique, les femmes sont rarement à la table des décisions. Je me suis retrouvée dans des situations où j’avais une perspective unique. Souvent, ce n’est pas une conversation facile, car vous êtes généralement le seul soldat. Mais j’ai appris à tirer parti de ma condition féminine et à être en mesure de défendre mon point de vue en tant que femme. Je suis en mesure de mettre en valeur mon expertise, de partager les nuances de la façon dont les femmes traitent certaines choses et d’être la voix de la raison. Je peux faire part d’un point de vue différent et important. Ça m’a vraiment aidée.

Par contre, je me souviens très bien d’un artiste, un artiste très connu, qui est venu parler à littéralement chaque personne dans la salle. Il s’est ensuite approché de moi pour parler à l’homme qui était à ma gauche. Et je l’ai rappelé à l’ordre. Je lui ai dit : « Tu viens vraiment au studio et tu parles à tout le monde ici, sauf à moi? » Et il m’a répondu : « Eh bien, mon erreur chérie, je ne savais pas de qui tu étais la fille. » J’ai répondu que je n’étais la fille de personne. C’est le genre de chose que j’ai aussi vécu. Vous identifiez-vous à cela? C’est si irrespectueux.

C’est encore un souvenir très clair pour moi. J’ai dû prendre une gorgée d’eau pour ça, car j’ai immédiatement commencé à voir rouge. Dans ma tête, je me disais que c’est une chose de ne pas m’écouter ou de ne pas répondre à mes questions. Mais de passer à côté de moi comme si j’étais invisible. Maintenant, je suis en colère et je dois vous dire ma façon de penser.

C’est donc les deux. Être une femme est aussi un désavantage. Cependant, toutes ces expériences m’ont aidée, encore une fois, à m’affirmer dans ce que je suis et dans ce que je représente, et à m’exprimer haut et fort à ce sujet, car les gens vous testeront.

Tanya : Exactement, si seulement les gens avaient un niveau de respect de base. Quelle est la plus grande victoire de votre entreprise à ce jour?

Brittney : Je suis très fière de qui je suis en tant que dirigeante et de l’entreprise que je bâtis avec King Creative Group. Chaque fois que quelqu’un m’appelle ou communique avec moi pour devenir un nouveau client ou pour obtenir plus de renseignements, c’est habituellement une recommandation de la part d’une personne qui a dit quelque chose de formidable au sujet de notre réputation. Les premiers mots de ces personnes sont : « Vous avez été fortement recommandé par telle ou telle personne. Et nous sommes à la recherche d’une personne qui fait de l’excellent travail. » Je suis vraiment fière d’être quelqu’un qui est très transparent, mais qui se soucie aussi du travail. Je suis très sélective à l’égard des clients que je choisis. La réputation que nous avons pu bâtir avec King Creative Group en très peu de temps est très positive. C’est inspirant. Les gens veulent travailler avec nous parce que nous faisons non seulement notre travail, mais aussi de bonnes affaires. Je crois que dans le type de secteur dans lequel je travaille, il y a très peu de gens qui ont de nobles intentions. C’est quelque chose dont je suis vraiment fière, non seulement dans la vie, mais aussi en affaires.

Tanya : J’adore votre réponse. Le fait d’avoir recours au bouche-à-oreille et à ces recommandations permet aux gens de voir le travail que vous faites et cela vous apporte une grande validation. Je comprends tout à fait cela. Selon vous, quel est le plus grand défi de votre entreprise?

Brittney : Ouf. Le plus grand défi, ce sont les ressources, les ressources financières. Surtout parce que nous sommes dans un secteur que les investisseurs ont de la difficulté à comprendre. Il y avait un mystère autour de la façon dont nous gagnons des revenus : « Alors, qu’est-ce que les redevances? » « Qu’est-ce que la maison de disque fait exactement? » « Combien d’argent dépensez-vous et comment récupérez-vous cet argent? »

Je crois que les choses commencent à devenir un peu plus claires, car il y a maintenant beaucoup de ressources et de renseignements qui sont partagés ouvertement au sujet du secteur de la musique. Auparavant, ces connaissances étaient gardées secrètes pour diverses raisons, mais les entreprises doivent maintenant faire preuve d’une plus grande transparence pour réussir.

Je traite maintenant mon entreprise comme si elle était en démarrage. Par conséquent, je dois être en mesure de trouver des investisseurs, des investisseurs providentiels et des financiers. Mais c’est la difficulté à laquelle je fais face. Parce qu’avec ces gens, je dois brosser le tableau le plus clairement possible pour qu’ils comprennent bien l’entreprise. C’est vraiment unique et difficile à comparer à des modèles d’affaires plus traditionnels auxquels ces investisseurs sont habitués. Jusqu’à présent, c’est l’un de mes plus grands défis.

Tanya : Vous pouvez choisir l’un ou l’autre, mais quelle a été l’incidence de la pandémie ou de la crise raciale sur votre entreprise?

Brittney : Lorsque la pandémie a frappé, je travaillais encore comme directrice générale d’une maison de disques. Nous avons dû modifier immédiatement un grand nombre de stratégies, comme la tournée des artistes, qui est la source de revenus la plus importante pour eux. Nous avons donc dû apprendre à changer de cap avec eux; en lançant plus de musique, en faisant les choses virtuellement et en étant en mesure de continuer à mobiliser leurs fans, même s’ils n’étaient pas en mesure de les voir en personne. Je dirais que les six premiers mois de la pandémie ont été très difficiles, mais nous nous en sommes sortis.

Nous avons dû nous adapter et rajuster nos attentes. Et je crois que c’est la chose la plus importante que j’ai apprise pendant la pandémie. Je crois que nous avons tous appris. C’est comme beaucoup de gens qui se rendaient au bureau cinq jours, 40 heures par semaine, et qui se sont dit que c’était excessif.

Tanya : Que voudriez-vous que les gens sachent sur le fait d’être noire et entrepreneure?

Brittney : C’est si difficile. Ce n’est pas ce qu’Instagram vous montre.

Tanya : Écoutez!

Brittney : J’ai souvent cette conversation avec d’autres femmes entrepreneures noires, parce que je suis aussi dans une période où je veux côtoyer d’autres personnes partageant les mêmes idées, et le thème est toujours le même, et les conversations semblables : « Tu fais tout. » J’ai eu cette idée. J’ai fait des recherches. Je l’ai créée et exécutée. J’ai accompli le travail. J’ai été payée. Chaque fois, j’ai ce sentiment incroyable, et je cherche constamment à le ressentir à nouveau.

L’entrepreneuriat a été l’une de mes expériences les plus gratifiantes, mais aussi les plus épuisantes que j’aie jamais vécues. Honnêtement, je ne ferais pas autrement, car cela me donne aussi la liberté et la souplesse que je veux. Ce que j’ai appris, c’est qu’il faut vraiment tout considérer comme source de joie. Honnêtement, c’est le cas.

Tanya : Absolument. C’est difficile en général, mais il y a en plus le fait d’être noire. Il y a des investisseurs qui ne vous comprennent pas, parce qu’ils ne vous ressemblent pas et qu’ils n’ont pas cette compétence culturelle. Ce sont toutes ces choses. Je comprends tout à fait. Ma dernière question porte sur la conciliation travail-vie personnelle; je la garde délibérément, car habituellement, la première réponse est un rire. Ils me disent : « Quelle conciliation travail-famille? » Parvenez-vous à trouver un équilibre entre votre vie personnelle et professionnelle et si oui, comment?

Brittney : Absolument, et ce n’est pas quelque chose que j’ai toujours fait. Mais j’en suis arrivée à établir un équilibre entre ma vie professionnelle et ma vie personnelle parce que j’ai vécu tant de situations d’épuisement professionnel au cours de ma carrière. Le secteur de la musique roule en tout temps. Tout est une urgence. Go, go, go. Allez, allez, allez. Vite, vite, vite. J’ai appris très tôt que ce rythme n’était pas durable. Au fil des ans, j’ai dû apprendre à établir des limites dans mon travail, car lorsque je laisse mon cerveau fonctionner en tout temps, je ne rends service à personne autour de moi. Je n’excelle pas. Mais lorsque je m’assure que je prends soin de moi en premier, que ce soit en me reposant ou en bougeant, peu importe ce dont j’ai besoin à ce moment-là, je peux être une meilleure leader. J’arrive à rendre d’autres personnes plus fortes.

J’ai dû suivre mon propre processus, et non seulement frapper le mur de l’épuisement professionnel, des attaques de panique et de toutes ces choses. J’ai dû prendre du recul et me dire que ça n’aidait personne. J’ai donc établi des limites, en faisant savoir à mes clients que je ne serai pas disponible à tout moment. Je ne suis pas une productrice de musique qui dit : « Je dormirai quand je serai morte. » Je suis une productrice qui dit : « Non, entre 22 h et 6 h, mon téléphone est sur silencieux. Quoi qu’il arrive pendant ces heures, vous n’aurez pas de nouvelles de moi avant le lendemain. »

Et je ne me sens pas mal à l’aise. Je crois fermement que vous devez établir et communiquer vos limites, car si vous ne le faites pas, les gens vous écraseront. Mais je ne crois pas que ce ne soit que ça le secret. Je n’ai pas l’impression d’avoir tout compris, mais je sais que c’est bien mieux qu’avant.

Tanya : Amen.

Brittney : Et je vis bien avec cela. Il y a des moments où les brûleurs du travail sont à haute température, et d’autres où les brûleurs personnels sont à haute température. Mais j’ai appris à m’adapter à la vie, à me libérer de la nécessité de la contrôler et à faire confiance à mon intuition, peu importe où elle me mène à ce moment-là. Et si cela implique que, pour cette semaine, je dois travailler fort, et que la lessive et la vaisselle ne se feront pas, c’est très bien ainsi. J’ai aussi appris à demander de l’aide, que ce soit dans ma vie personnelle ou au travail. J’ai appris à demander de l’aide et à ne pas me sentir comme si je devais tout faire toute seule. Je m’efforce de créer un équilibre dans ma vie.

Tanya : Formidable. J’adore votre réponse. C’est quelque chose que vous devez faire intentionnellement, et c’est du travail. Trouver l’équilibre est un travail. Il ne viendra jamais à vous, vous comprenez ce que je veux dire? C’est quelque chose qui…

Brittney : Vous devez le créer.

Tanya : Absolument.

Brittney : Il faut le créer, parce qu’il y aura toujours quelque chose à faire, toujours. Il y aura des courriels qui nécessiteront une réponse et des présentations à terminer. Il y a toujours des choses à faire, comme la lessive, ou n’importe quoi d’autre. Et j’en tiens compte dans mon horaire; ce n’est pas toujours très précis, mais j’ajoute des jours de repos à mon horaire avant de me sentir épuisée. Je me dis : « Oh, je dois planifier une journée de repos. » Parce que je le sens littéralement dans mon corps.

Tanya : Quelle excellente façon de terminer cette conversation. Merci beaucoup.

 

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Noire et déterminée est une série d’interviews mensuelles menée par l’écrivaine et entrepreneure primée Tanya Hayles. Tanya est la fondatrice de Black Moms Connection, un village en ligne mondial de près de 30 000 personnes, qui est aussi un organisme sans but lucratif qui fournit des programmes et des outils financiers au moyen de subventions généreusement financés par BMO. Les déclarations et les opinions exprimées par les invités et les personnes interrogées sont les leurs et ne reflètent pas nécessairement les vues de la Banque de Montréal ou de ses sociétés affiliées.