Nom: Odeen Eccleston
Entreprise: WE Realty Inc. | The Wiltshire Group
Secteur:Immobilier / Construction

 

Tanya : Nous avons parlé à plusieurs reprises de votre parcours vers l’entrepreneuriat, mais quel en a été le fondement? Comment cela se passe-t-il pour vous?

Odeen : J’ai toujours su que je voulais avoir plus d’une source de revenus. Comme mon père avait plusieurs entreprises, c’est quelque chose qui m’a été inculqué dès l’adolescence. Pendant mes études universitaires, je me suis tournée vers le métier d’actrice et j’ai joué dans quelques publicités nationales qui rapportaient beaucoup. Je me suis demandé ce qu’il y avait d’autre pour moi, et j’ai alors commencé à m’intéresser à l’immobilier. Au cours de ma première année, j’ai reçu un prix de recrue de l’année, car j’avais conclu plusieurs transactions.

Apparemment, pour quelqu’un qui en est à sa première année dans le secteur immobilier, ce n’était pas normal. J’étais si occupée que je ne pouvais pas garder les deux occupations. J’ai donc démissionné de mon agence artistique pour me concentrer sur les affaires immobilières à temps plein. Ce faisant, en plus d’acquérir des propriétés en cours de route et d’investir chaque fois que j’en avais l’occasion, j’ai rencontré mon partenaire d’affaires actuel, Lamont, qui avait le même esprit d’entrepreneuriat que moi. Lorsque nous étions prêts, nous avons démoli l’une des propriétés dans lesquelles nous avions mutuellement investi et nous avons construit notre première maison. C’était le fondement de mon parcours entrepreneurial en tant qu’investisseuse immobilière, courtière accréditée pour notre agence de courtage immobilier, et bien sûr promotrice immobilière. Nous avons donc en quelque sorte commencé par des opérations de vente-achat, puis nous avons bâti une maison à la fois. Et maintenant, nous construisons de petites enclaves et de petites collectivités.

Tanya : De petites enclaves. Le mot « enclave » est tellement attrayant. Donc, à part d’avoir trouvé le bon partenaire et de lui avoir dit « voici ce que nous allons faire », quelle a été votre décision d’affaires la plus audacieuse?

Odeen : C’était assurément d’apprendre à faire appel à d’autres gens avec qui je pourrais partager mes tâches. J’étais sur le point de m’épuiser et d’atteindre ma limite. Je ne pouvais pas continuer à jouer tous ces rôles. Quand est venu le temps d’ouvrir l’agence de courtage et de reproduire mes capacités de vente et mon rôle de courtière immobilière, j’ai été en mesure de donner à d’autres personnes un pouvoir d’agir, et en même temps de me le donner à moi-même, car quand les clients se tournaient vers moi, au lieu de devoir les refuser, je pouvais compter sur cette équipe pour les servir. Je dirais donc que c’était probablement mon coup le plus audacieux jusqu’à présent : apprendre à être à l’aise d’obtenir de l’aide professionnelle, dans ce cas-ci en engageant des courtiers immobiliers au sein de ma propre société de courtage.

Tanya : Oui. La nécessité d’embaucher et de déléguer constitue une grosse étape pour les entrepreneurs et on ne lui accorde pas nécessairement assez d’importance. Quel a été le tournant financier le plus important pour votre entreprise? Le moment où vous vous êtes dit : « J’ai réussi ».

Odeen : Je dirais que l’un des moments décisifs et joyeux les plus importants est celui où Lamonte et moi avons vendu la première maison que nous avons construite. Nous ne l’avons pas seulement vendue, nous avons aussi conclu la transaction. Nous-mêmes. Nous avons conceptualisé, conçu et construit une maison à partir de rien à l’aide de notre propre imagination, et une famille est tombée sous le charme de celle-ci, l’a achetée et y est emménagé.

C’était donc un moment décisif, non seulement sur le plan fiscal ou financier, mais aussi au chapitre de notre confiance, parce que nous avons pu nous prouver que nous pouvions y arriver.

Tanya : INCROYABLE. Et comment le fait d’être une femme dans votre secteur d’activité vous a-t-il aidée? Nous savons déjà que les chiffres et les statistiques sont peu reluisants, et je suis certaine que les femmes dans le secteur de la construction et de l’immobilier sont habituellement reléguées à certains postes et à certains rôles, mais y a-t-il des avantages qui vous ont aidée à réussir en tant que femme dans votre secteur d’activité?

Odeen : Absolument. Tout d’abord, les chiffres seuls font en sorte que lorsqu’on est une femme en construction qui porte un casque et des bottes à embout d’acier, qui se salit pour apprendre son métier et qui est non seulement capable de déléguer, mais aussi de faire les choses soi-même, on ressort encore plus du lot. Je crois aussi fermement que l’énergie féminine est parfois avantageuse. Il peut s’agir d’une approche plus intuitive, par exemple. Je crois aussi au pouvoir des relations en affaires et, en tant que femme, je pense que les femmes sont en mesure d’entretenir des relations d’une manière différente que les hommes.

Tanya : Quel avenir entrevoyez-vous pour les femmes dans votre secteur d’activité? Voyez-vous plus de femmes entrepreneures en construction et de sociétés de courtage dirigées par des femmes?

Odeen : Oui. Sur le terrain, je travaille de plus en plus avec d’autres courtières immobilières, des courtières accréditées. En ce moment, en fait, toutes les personnes, tous les courtiers au sein de mon agence sont des femmes. Je vois de jeunes femmes qui se demandent quoi faire à l’université, et je leur dis d’envisager également les métiers manuels. En tant que femme, envisagez les métiers manuels. C’est un domaine dynamique où chaque jour est unique. Et je crois que de plus en plus de femmes et de filles prennent conscience du domaine de la construction.

Tanya : J’adore votre réponse. Quel est le plus grand défi de votre entreprise à l’heure actuelle?

Odeen : En ce moment, le défi pour notre société de promotion immobilière, c’est assurément l’acquisition de terrains, en particulier ici en Ontario. Les gens sont nombreux à s’en aller, car le coût de la vie, de l’immobilier et des terrains est très, très, très élevé. Nous avons donc comme objectif de travailler sur des initiatives de logement abordable, mais les critères changent toujours parce que le prix des terrains continue de grimper. Cela me chagrine sincèrement, car l’un de nos objectifs est de travailler sur des initiatives de logement abordable, mais nous y travaillons. Encore une fois, je crois ou j’espère, à tout le moins, qu’en cultivant les bonnes relations, nous mettrons éventuellement en place des mouvements sociaux et politiques.

Tanya : Comment la pandémie qui touche la planète et la crise raciale que nous traversons ont-elles affecté vos activités?

Odeen : Comme nous le savons, cela a directement contribué à la hausse de la demande de services de réinstallation. Notre entreprise de construction domiciliaire et de courtage immobilier a connu une année particulièrement occupée depuis la pandémie, ce qui allait à l’encontre de toute attente.

En ce qui concerne la crise raciale, je crois certainement qu’elle a contribué à sensibiliser davantage les consommateurs aux préjugés qu’ils ont pu avoir à l’égard des professionnels noirs et des personnes noires en général. Parce que nous avons servi des clients cette année, et même l’an dernier, qui ont expressément demandé ou qui souhaitaient obtenir une soumission d’une société composée de personnes noires. De toute évidence, nous sommes toujours honorés de servir tout le monde. Il est important pour nous que tout le monde ait une expérience optimale, mais nous sommes heureux que, grâce à cette prise de conscience, certains aient davantage pensé aux entreprises appartenant à des Noirs. C’est donc une bonne chose.

Tanya : Absolument. Tant mieux si cela apporte de vrais changements, car la plupart des carrés noirs et des énoncés symboliques n’ont absolument rien fait. J’aime entendre que cette crise a véritablement contribué à vos affaires sur le plan financier. Les clients vous choisissent, non pas parce que vous êtes noire, mais parce que vous êtes bonne dans votre travail. Je connais déjà la réponse à la dernière question, mais j’aime la poser parce que j’adore entendre la réponse spontanée. Comment parvenez-vous à trouver un équilibre entre votre vie personnelle et professionnelle?

Odeen : Eh bien, je dirais que je suis le plus productive lorsque je suis le plus comblée sur le plan personnel. Ma productivité est à son maximum dans nos activités lorsque ma vie personnelle me satisfait au maximum. Je dois être heureuse et bien reposée. C’est une priorité, car l’un ne va pas sans l’autre. Si ce n’est pas le cas, si je n’ai pas l’esprit en paix, je ne serai pas aussi motivée sur le plan professionnel. Pour moi, la conciliation travail-vie personnelle est un élément clé de ma réussite globale. Comprenez-vous ce que je veux dire? Je ne sais pas comment le dire de façon plus concise.

Tanya : C’était bien concis. Ce qui est drôle à ce sujet, c’est que vous êtes la première à l’avoir dit de cette façon. La plupart des gens répondent que c’est impossible, que ça n’existe pas. C’est la première fois que la réponse est présentée d’une façon complètement différente. C’est pour cette raison que je garde la question. Bien entendu, les femmes se le font constamment demander, mais je n’y ai jamais pensé sous cet angle, et vous avez tout à fait raison.

 

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Noire et déterminée est une série d’entrevues mensuelles menées par Tanya Hayles, entrepreneure, nommée au palmarès des 25 femmes les plus influentes au Canada et lauréate de BMO rend hommage aux femmes. Tanya est la fondatrice de Black Moms Connection, un village en ligne mondial de près de 20 000 personnes, qui est aussi un organisme sans but lucratif qui fournit des programmes et des outils financiers au moyen de subventions généreusement financés par BMO.